Projet de loi : Bitcoin comme pilier stratégique et économique de la France ?

  • Oct 29, 2025

La France sur le point d'embrasser Bitcoin?

Projet de loi : Bitcoin comme pilier stratégique et économique de la France ?
La france sur le point d'embrasser Bitcoin?

Pour la plupart d'entre nous, le Bitcoin et les cryptomonnaies évoquent des investissements risqués, un Far West numérique réservé aux plus audacieux et aux initiés de la technologie. On les perçoit comme une classe d'actifs de niche, spéculative et déconnectée des grandes stratégies nationales.

Pourtant, une proposition de loi formelle et détaillée vient d'être déposée à l'Assemblée Nationale française, visant à faire du Bitcoin un pilier de la stratégie économique et souveraine du pays.

Loin d'être une simple fantaisie technologique, ce document présente une vision radicale pour l'avenir monétaire de la France.

Cet article décortique les six éléments les plus surprenants et percutants de ce projet ambitieux.


Voici 6 révélations sur un projet de loi qui défie les USA :

1. Les États-Unis sont décrits comme le chef de file d'un nouvel ordre monétaire, et la France est dangereusement à la traîne.

La proposition de loi ne présente pas l'adoption de la cryptomonnaie comme une tendance technologique, mais comme une course géopolitique cruciale que la France est en train de perdre. Le document (Proposition de loi, n° 2022) détaille une stratégie américaine agressive, prétendument mise en place sous une administration Trump en 2025. Cette stratégie inclurait la création d'une réserve stratégique de bitcoins (les États-Unis détiendraient déjà 213 297 BTC) et l'adoption du « Genius Act » pour réglementer et promouvoir les stablecoins (cryptomonnaies stables) adossés au dollar américain.

Plus alarmant encore, le texte met en lumière une proposition de la sénatrice américaine Cynthia Lummis visant à acheter 200 000 bitcoins supplémentaires par an jusqu'en 2030. Le document brosse ainsi le portrait d'une Amérique qui avance à une vitesse foudroyante, avec des factions politiques prévoyant d'accumuler plus de 1,4 million de bitcoins, soit près de 7 % de l'offre totale d'ici la fin de la décennie. Dans ce contexte, la réponse française semble à la fois radicale et à peine suffisante.

Cette vision positionne la crypto comme un instrument de la domination géopolitique américaine. Les stablecoins en dollars, en particulier, sont présentés comme un moyen pour les États-Unis d'étendre leur influence monétaire mondiale, y compris en Europe. Cette inquiétude est partagée au plus haut niveau, comme le souligne le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau :

« le risque pour l’Europe, c’est d’être demain confrontée à une quasi-monnaie, le stablecoin en dollars, de nature privée et émise par des acteurs non européens »


2. La France devrait créer une réserve stratégique massive de 420 000 bitcoins.

Au cœur de la proposition se trouve une recommandation spectaculaire : l'accumulation par la France d'une réserve stratégique de 420 000 bitcoins. Ce chiffre, qui représente 2 % de l'offre totale de bitcoins qui existera un jour, est tout sauf anodin.

Pour mettre ce nombre en perspective, il faut le comparer aux réserves d'or du pays. La France est actuellement le quatrième plus grand détenteur d'or au monde, avec 2 437 tonnes (6,6 % du total détenu par les banques centrales), tandis que les États-Unis en possèdent 8 133 tonnes (22 %). La proposition révèle ici sa logique stratégique : l'objectif de 420 000 bitcoins a été calculé pour refléter la position géopolitique existante de la France.

Tout comme la France détient environ un tiers des réserves d'or américaines, ce plan vise à ce qu'elle possède environ un tiers des réserves de bitcoins projetées des États-Unis. La démarche suit donc la même logique que celle qui justifie la détention d'or : se doter d'un actif de réserve rare pour garantir la souveraineté financière de la nation.


3. Le plan pour acquérir ces bitcoins est radical (et ne coûterait rien au budget).

La question la plus évidente est : comment financer une acquisition d'une telle ampleur ? La proposition de loi avance cinq méthodes surprenantes, conçues pour être neutres sur le plan budgétaire.

  • Le minage (Mining) : Utiliser les surplus d'électricité du parc nucléaire français pour miner de nouveaux bitcoins.

  • Les saisies judiciaires : Conserver les bitcoins saisis lors d'opérations de police au lieu de les vendre aux enchères.

  • Les ventes d'actifs de l'État : Affecter le produit de la vente de participations de l'État dans des entreprises à l'achat de bitcoins.

  • L'épargne populaire : C'est peut-être l'élément le plus audacieux. Le plan propose de réorienter 25 % des fonds collectés par les très populaires Livret A et LDDS (Livret de Développement Durable et Solidaire) vers l'achat de bitcoins. En 2024, ces deux livrets ont collecté près de 22 milliards d'euros. La proposition redirigerait donc environ 5,5 milliards d'euros par an, soit 15 millions d'euros par jour, de l'épargne la plus prudente des Français vers l'acquisition d'un actif volatil.

  • Les paiements d'impôts : Permettre aux citoyens et aux entreprises de payer leurs impôts en bitcoins.


4. Bientôt, des paiements quotidiens en cryptomonnaie, sans impôt.

Pour faire sortir les cryptoactifs du monde de la spéculation et les intégrer à l'économie réelle, la proposition suggère d'autoriser les particuliers à effectuer jusqu'à 200 euros de paiements par jour en utilisant des stablecoins libellés en euros, et ce, sans déclencher aucune obligation fiscale.

L'analyse présentée dans le texte souligne un double avantage :

  1. Premièrement, cette mesure permettrait d'injecter dans l'économie réelle entre 21,4 et 26,22 milliards d'euros actuellement « bloqués » dans les comptes de cryptoactifs des Français.

  2. Deuxièmement, elle offrirait aux commerçants et aux consommateurs une alternative aux frais de transaction élevés imposés par les réseaux de paiement dominés par les géants américains Visa et Mastercard.

5. La proposition déclare la guerre à l'euro numérique.

Ici, la proposition fait son geste le plus provocateur : elle propose d'interdire le développement d'une monnaie numérique de banque centrale (MNBC), communément appelée « euro numérique ».

L'argumentation est double et sans équivoque.

  1. D'abord, sur le plan des libertés, une MNBC est présentée comme un outil de contrôle centralisé menaçant la vie privée et le droit de propriété, avec une référence au système de « crédit social » chinois comme exemple effrayant.

  2. Mais la proposition avance un argument économique encore plus puissant : un euro numérique émis par la BCE entrerait en concurrence directe avec les dépôts des banques commerciales. La monnaie de la banque centrale étant perçue comme plus sûre, cela pourrait déclencher une fuite massive des dépôts bancaires (un « Bank Run ») déstabilisant fondamentalement l'ensemble du système bancaire français et européen.


6. Les mythes sur la crypto sont officiellement démystifiés.

La proposition de loi consacre une partie importante de son argumentaire à déconstruire deux des critiques les plus courantes à l'encontre des cryptomonnaies.

  • Le blanchiment d'argent : S'appuyant sur un rapport du Trésor américain, le texte affirme que la finance traditionnelle et l'argent liquide restent les principaux vecteurs du blanchiment. En raison de la traçabilité inhérente aux chaînes de blocs, les transactions illicites en crypto ne représenteraient qu'une infime fraction du total (0,34 % en 2023).

    Note : c'est moins de 0,20% selon les nouveaux chiffres de Chainalysis.
  • L'impact environnemental : Le document contre-argumente que le minage de Bitcoin, loin d'être un désastre écologique, peut être un outil de stabilisation des réseaux électriques. Il permettrait d'utiliser des surplus d'énergie intermittents ou inexploités, comme ceux issus du nucléaire ou des énergies renouvelables. Une étude de l'Université de Cambridge citée dans le texte (datée d'avril 2025) conclut que 52,4 % du minage de Bitcoin est déjà alimenté par des sources durables.

En conclusion

Cette proposition de loi n'est pas un simple ajustement réglementaire. C'est une vision complète et audacieuse pour la souveraineté monétaire de la France, son dynamisme économique et sa place dans un nouvel ordre financier mondial en gestation.

Elle cherche à transformer le Bitcoin d'un actif spéculatif à un pilier de la stratégie nationale.

La proposition soulève des questions fondamentales sur l'avenir de la monnaie, le rôle de l'État et l'équilibre des pouvoirs géopolitiques. Reste maintenant la question principale pour les législateurs et les citoyens : s'agit-il d'une vision audacieuse pour l'avenir de la France ou d'un pari risqué avec les finances de la nation ?

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